jeudi 5 juillet 2012

Chap. 10 : Eh, Néné, vise un peu la Credoïnunumdeum !






Hrosvitha m’appelle : Juste pour te dire que tu peux être un chic type, quand tu veux. Bonne journée. Je t’embrasse. Tant de bons sentiments, dès le matin, m’inquiétaient un peu ! Côté boulot, j’avais envie de finir la lecture des bouquins que j’avais sortis de la bibliothèque et de me mettre à penser aux personnes que j’allais pouvoir aller voir. J’avais trois idées : une pute, une religieuse, une mère de famille (genre TéléPlus). Je me disais qu'avec ça je pouvais couvrir un éventail susceptible d’intéresser mon lectorat de merde. Mon pote Néné, avec qui j’avais pas parlé depuis au moins quinze jours, m’appelle.

- Salut, vieux grigou !
- Eh, Néné, qu’est-ce que tu fous !
- Comme d’hab’ !



Mon pote Néné était prof de philo dans une fac remplie de branleurs cravatés ou noeud-papillonnés qui se secouaient les neurones à longueur de journée sur des concepts creux sortis tout droit de la sociologie, de l’anthropologie, de la psychologie, bref, des cons, des cons prétentieux qui le regardaient du coin de l’œil, tout ça parce qu’il parlait plus volontiers de Merleau-Ponty, de Maldiney, de Peirce et de Du Bouchet ou de Manciet que de Bourdieu, de Lacan, de Sloterdijk et de Guillevic ou de Grosjean ! Néné avait cinq ans de moins que moi, écrivait un traité de logique, publiait de temps à autres une plaquette de poésie, buvait comme une outre, et avait pour le cul une passion exclusive, l’orifice de la mignonne avec laquelle il vivait. Faut dire que sa poule était canon ! Il était moyennement porté sur la question, ce qui ne l’empêchait pas de s’enfiler une étudiante une ou deux fois par an ! Sa pouliche était prof, comme lui, mais elle, ce qui la faisait mouiller, c’était les langues orientales. Chacun sa merde ! On était potes depuis plus de dix ans et depuis dix ans il ne manquait pas une occasion de m’envoyer dans les dents que je pourrais faire autre chose que travailler pour cette revue incongrue qu’il disait. Il disait ça pour me remonter le moral, il attendait mon grand roman !

- Et à part ça ?
- Dis donc, tu devrais filer un coup d’œil à un philosophe italien qui s’appelle Giorgio Agamben, y a plein de choses pas mal là-dedans !
- En ce moment, non, j’ai eu la brillante idée de proposer à Belami une série d’articles sur C’est quoi l’amour ?, alors je lis des mémoires de putes et je vais certainement aller en interviewer quelques-unes !
- Tu fais ce que tu veux, mais tu pourrais peut-être te remettre à bosser vraiment un peu, non ?
- Mouais.
- Si je me souviens bien, le dernier article qu’on a écrit ensemble, ça fait... quatre ans, c’est ça ?
- ...
- C’était quand même pas mal, non ? T’aurais pas envie qu’on s’y remette ?
- Pour le moment, non !
- Allez, sois pas ridicule ! On m’a demandé de pondre un truc sur l’illisible, c’est pas mal comme sujet, qu’est-ce que t’en penses ?
- Ouais, pas mal, pas mal !
- Ben alors, c’est oui ?
- On en reparle.
- Autrement, ça va ?
- Comme d’hab’ !
- Ça y est, Charles le grand est amoureux !
- Déconne pas tu veux !
- Raconte, allez, raconte !
- Attends, j’ai un autre appel. T’es chez toi ?
- Oui, oui.
- Je te rappelle dans cinq minutes.
- À tout de suite.
- Allô !
- Monsieur Montluc ?
- Oui, c’est moi.
- Je m’appelle Guillemette Credoïnunumdeum (et moi, c’est Credoïnunumchatum ! que je pensais), excusez-moi de vous déranger, je vous téléphone de la part de María Asunción Belami !
- Mais vous ne me dérangez pas du tout, chère Madame. Notre amie commune m’a en effet parlé de vous.
- Je suis très embarrassée, vous savez, et je suis vraiment confuse de vous déranger au milieu de vos travaux (mes travaux ? Ça faisait des lustres qu’aucun maçon n’était venu me défoncer une cloison ou changer le parquet. Mes travaux ? Qu’est-ce qu’elle avait bien pu lui dire cette isalope-céphalo-frigide de Belami !), mais je crois que dans l’affaire en question, votre aide me serait des plus précieuses !
- Que dites-vous de cet après-midi, vers seize heures ?
- Ça me semble parfait.
- Vous avez mon adresse ?
- Oui, merci.
- À cet après-midi, donc.
- Oui, oui, et merci. Au revoir, cher monsieur Monluc.
- Au revoir, chère Madame.

Rien ne me plaisait plus que ces rencontres-découvertes d’un jour ! Bien sûr, elle pouvait être tout simplement moche à fuir, et puis, pourtant, pour une fois, peut-être que je pourrais rien que lui donner le coup de main dont il s’agissait ! que je me disais. Mais il y avait quand même un je-ne-sais-quoi qui me titillait la cervelle, c’est que les huppées, les agenouillées devant le-corps-du-Christ-Amen, moi, ça m’excitait, tout bonnement ! On verrait bien. Bon, je rappelle Néné. En fait, ce qui me faisait bander, c’était de décoincer les culs-bénits ! Et je m’en foutais comme de l’an dix-sept de pas être original, l’originalité n’est qu’une couillonnade de plus, mouais !

- Néné ? C’est Charles. On en était où ?
- T’allais me raconter...
- Oh, pas grand chose !
- Sacré loustic, va !
-Bon, un peu, quand même ! Hildegarde, Héloïse, un peu les deux à la fois, rien de très extraordinaire !
- Sacré loustic, va ! Alors, on se voit pour ce truc sur l’illisible ?
- On se rappelle bientôt, d’accord ?
- Ça marche ! Tiens, dis donc, l’autre jour j’ai vu ta transie !
- Hrosvitha ?
- Oui, oui. Mais qu’est-ce que tu leur fais aux femmes pour qu’elles soient comme ça ?
- Et comment elle était ?
- Comme lui, j’ai jamais aimé personne, qu’elle me dit, c’est un salaud, et je l’aime ! C’est comme ça que tu les tiens tes langoureuses ?
- Laisse tomber, tu veux !
- D’accord ! Bon, allez, on s’appelle !
- Salut.
- Salut.

Ma transie, mes langoureuses, tu parles ! Lorsque je l’ai connu, Néné, il vivait avec une Islandaise, nymphomane et d’une putain de jalousie, je me demande même si elle était pas jalouse de la main qui secouait sa queue quand il avait finit de pisser ! Y pouvait parler avec personne, regarder personne, bref, une chieuse qu’il fallait tringler deux ou trois fois par jours, n’importe où, quand ça la prenait, et ça la prenait sans arrêt, et même quand elle avait ses règles, elle pouvait pas la lui laisser tranquille, sa queue à mon Néné, non, fallait qu’elle la suce ou qu’elle la branle, elle lui disait que c’était plus fort qu’elle, qu’elle pouvait pas vivre sans ça ! Il a tenu deux ans ! Une performance ! Des fois on en parlait, je lui disais qu’il avait une petite mine, il me répondait qu’il avait un drôle de régime désalimentaire, et pourtant il bouffait ! Moi aussi, j’en avais connu une, d’enflammée de la chatte, quand j’avais une vingtaine d’année. Elle était chouette, celle-là aussi, et en plus, c’était du genre marathon ! Comme un prisonnier qui essaierait de limer les barreaux de sa prison avec une brosse à dents, jamais ça cédait, fallait continuer ! Un jour, j’en ai eu plein le cul, j’ai loué un marteau piqueur et j’ai arraché toute la fenêtre et me suis envolé, ciao belladonna ! Ce qui use généralement chez les êtres humains, c’est la durée, parce que moi, je dirais pas non à une folle-dingue de l’aller-retour, un jour par ci, un jour par là, mais pas en pension complète au mois !

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